Fëanor marchait dans les rues de Loitaceila, tête basse et mine boudeuse sur le visage. C'était rare de le voir ainsi, lui qui était d'habitude une pile électrique bruyante et amusante. Mais cette fois ci on aurait dit qu'il tentait de se faire tout petit, les mains enfoncées dans les poches de sa veste. Il soupirait, shootant dans des cailloux alors qu'il avançait jusqu'au palais royal, accompagné des autres soldats mages qui étaient censés faire équipe avec lui dans une mission de moyenne importance à la frontière Pandora-Caucase, mais ils avaient été rappelés au palais par Akashi le matin même. Et cela avait le don d'énerver Fëanor, qui s'était montré très enthousiaste à l'idée de partir en mission. Au lieu de ça, il allait assister à une réception chiante, toute la cour d'Akashi y était conviée, ce qui voulait dire qu'il allait devoir faire attention à ce qu'il disait et faisait pendant une journée et une nuit, peut être plus longtemps.
En résumé, chienne de vie.
« On est vraiment obligé d'y aller ? » marmonna Fëanor en se retournant vers un des soldats, un homme d'âge mûr dont le visage était partiellement masqué par une capuche. Celui ci haussa les épaules en lui répondant d'une voix traînante, signe qu'il n'était pas plus heureux d'y aller que notre pyrobarbare national. En même temps, les soldats et les mages, s'ils n'étaient pas importants socialement, faisaient office de plantes, de meubles, bref de décor jusqu'à ce que la réception se finisse. Ne pas devoir s'asseoir, ne pas devoir parler... Génial. Une vraie partie de plaisir. Ils passèrent les grilles du palais, puis se séparèrent, certains allant remettre leurs chevaux dans leur box, d'autres se changer... Fëanor lui ne prit pas la peine de retirer son armure, celle ci ne couvrant que partiellement son corps et n'étant pas trop imposante de toute manière. Il entra donc dans la salle de réception, vêtu de sa fameuse veste rouge, de ses vêtements normaux, le tout mêlé à quelques pièces d'armures, et enfin sa hache accrochée dans son dos. Il avait l'impression de faire un peu tâche parmi les invités habillés richement, entre ses habits de combat, l'odeur de grillé qu'il trimbalait un peu partout (en même temps il était un barbecue sur pattes, comment voulez vous qu'il fasse autrement) et son air de gamin malgré le fait qu'il avait atteint les vingt ans depuis peu. Il traversa la salle du regard plusieurs fois, cherchant à repérer une tête connue, sans succès les premiers instants, avant qu'il n'aperçoive quelqu'un qu'il connaissait bien : Mnemosyne. Surnommé Mnemo par.. Beaucoup de gens, c'était un mage noir qui avait la particularité d'avoir comme arme un ventilateur. Oui, c'est pas courant. Mais en tous cas ça marchait. Sentant les battements de son palpitant s'accélérer en observant Mnemo (ah, l'amour /soupir niais/), Fëanor décida de le rejoindre, se glissant vers lui avec toute la discrétion que pouvait lui apporter ses vêtements rouges vifs. Il tapota l'épaule de Mnemo, tout sourire.
« Coucou ! » s'exclama-t-il joyeusement, souriant de plus belle lorsque le jeune homme aux cheveux incontrôlables tourna la tête vers lui, ce qui devait lui donner un air très idiot, voire niais. Mais bon.

C'est sûr que ce n'était pas le meilleur endroit pour se faire des papouilles. En même temps, le niveau de niaiserie qui avait empli l'esprit de Fëanor au moment où il avait vu l'incroyable, le magnifique, l'inimitable Mnemosyne avait dépassé tout ce qu'on aurait pu imaginé. Et oui, à ce point. En même temps, Fëanor était fou amoureux. Limite, c'était marqué en rouge fluo sur son front, et autour y avait des petits néons qui clignotaient. Bref, si tu ne remarquais pas que Fëa craquait totalement pour Mnemo, tu avais du caca dans les yeux. Le chevelu (appelons le comme ça, puisque la chevelure de Mnemosyne était incontrôlable. Fëanor n'est pas mal dans le genre mais ça va, c'est encore gérable.) répondit, surpris :

« Mais qu'est-ce que tu fous là toi ? »

Bonjour, aussi... Fëanor ne se vexa pas de l'absence de salut, puisque quelque chose l'accapara bien vite et le fit oublier le manque flagrant de politesse de son petit ami, puisque celui ci trouva intelligent de se pencher pour embrasser brièvement notre pyrobarbare, qui devint vite aussi écarlate que ses vêtements. C'était. Adorable. Bon il avait l'air un peu con et Mnemo semblait gêné à mort mais c'était adorable. Se rapprochant de son mage noir favori pour aller "discrètement" prendre sa main et entremêler leurs doigts, il l'observa reprendre la parole :

« Je sens qu'on va se faire un peu chier... »

Ah, ça... C'était sûr qu'il n'avait pas tort. Fëanor soupira, calant sa tête contre son épaule, malgré qu'il soit plus grand que Mnemosyne. Las, il répondit -enfin- à l'homme aux cheveux diaboliques :

« Ben je crois qu'on a tous été appelés à venir ici... Mais tu crois qu'on est obligés de rester là toute la journée ? »

Il marqua une petite pause, avant de tourner la tête pour lancer un regard stupéfait à Mnemosyne.

« Comment on fait, si on a faim ou qu'on a envie d'pisser ? »

Fëanor n'avait jamais aimé la foule. Cela le stressait. Il n'était certainement pas le seul à se sentir vulnérable lorsqu'il était entouré par un nombre incalculable de personnes. Cette angoisse qui étreignait le coeur du pyrobarbare le poussait à s'accrocher au bras de Mnemosyne, l'enserrant avec une force qu'on ne lui aurait pas soupçonné. Mnemo, quant à lui, le regardait, amusé par sa question. Est ce qu'il se moquait de lui ? Fëanor soutient son regard, soudainement mal assuré. Eh, il avait rien dit de débile, si ? Le mage noir répondit soudainement, avec un grand sourire aux lèvres, sous les yeux pleins d'interrogations du pyrobarbare qui attendait avec impatience sa réponse. Réponse qui fut pour le moins étrange.

« Ouaip, toute la journée. Tu crois que c'est pour quoi que les sièges sont aussi crades ? »

Alors là, soyons honnêtes, Fëanor mit du temps à comprendre. Un faible "aaah" de dégoût franchit ses lèvres tandis que l'information remontait à son cerveau. Urgh, il n'allait plus s'asseoir sur un siège du palais pendant des années, maintenant qu'il savait ça. Il secoua la tête vivement, alors que Mnemosyne continuait de parler :

« Nan sérieux... me semble t'es la seule chose à croquer ici. »

Les joues de Fëanor devinrent rapidement aussi rouge que sa tenue, sans qu'il ne sache quoi répondre. Embrasser Mnemo n'aurait pas été une très bonne idée. Enfin, dans la forme, si, mais dans le fond non, car ils n'avaient pas le droit de sortir de la salle, et d'être donc un peu... Seuls, v'voyez. Fëanor se fit tout petit, gêné, avant de bafouiller un vague :

« C'est gentil. »

Que dire de plus, honnêtement ? Sinon leur discussion allait finir par être totalement graveleuse, alors qu'ils étaient entourés de centaines de personnes. Non, c'est vraiment pas l'endroit. L'estomac de Fëanor le rappela soudainement à l'ordre bruyamment.

« Mais le truc c'est que j'ai vraiment faim en fait, marmonna le pyrobarbare. »

Il serra de plus belle le bras de Mnemosyne entre ses mains, résistant à l'envie de cacher son visage contre son épaule, alors que son ventre ne cessait de protester. Il était ridicule. Enfin, encore plus que d'habitude. Et il avait super méga faim. Pourtant ce matin il avait mangé ! Mais apparemment, pas suffisamment. Désespoir. Il releva de grands yeux de poupet battu vers Mnemo, attendant que celui ci trouve une solution.

Cette douleur au ventre à la con. T'avais l'impression que ton estomac se déchirait en mille morceaux, limite c'est comme si tu avais tes règles. Tu supposais, car ta nature de mâââle ne t'avait pas conféré cette merveille que sont les règles. Tu pris le temps de bien te muni-muni les joues, tentative désespérée pour faire disparaître ce rouge carmin disgracieux sur tes pommettes. Fail. Oh, écoutes, même les meilleurs font n'importe quoi des fois, hein. Et en plus toi t'es pas un de meilleurs donc tu es pardonné. Tiens, un nouveau gargouillement. Tu as soudainement l'impression que chaque personne dans la salle se retourne vers toi (alors que pas du tout), et tu colles ton entité corporelle brûlante de magie de feu contre ton petit copain qui doit actuellement subir les effets de la canicule. Le pauvre. Enfin peut être pas aussi pauvre que ça car, au lieu d'agir en prince charmant et aller te chercher de quoi te restaurer, il lâche un :

« Ben regardes le gars avec sa saucisse là-bas, ça va te passer l'envie de manger. »

En mode "je m'en bats les couilles frère", et t'indique d'un vague geste de main un homme absolument dégueulasse (et encore dégueulasse est un euphémisme) en train de récupérer une saucisse pleine de sauce tombée au sol. Alors que le pyromage aurait pu répondre un "oh mon dieu" plutôt distingué, il préféra s'exclamer un "Oh sa mère" de dégoût. Pourquoi pas. Ceci fait, il reprend la parole en marmonnant, détournant le regard :

« Il peut pas aller astiquer sa saucisse ailleurs... ? »

Fëanor, gentil petit Fëanor, la prochaine fois, ne sort pas des trucs aussi tendancieux alors que Mnemo est juste à côté, tu veux. Quelques instants plus tard, le plus jeune lève des yeux larmoyants vers son copain pour lui demander d'une petite voix :

« Diiis... Tu peux m'accompagner en cuisines, j'ai vraiment vraiment vraiment faim... »

Limite il pourrait pleurer pour le faire accepter. Allez Mnemosyne, ouvre tes chakras et brave l'interdit avec Fëanor.