Je suis né en plein coeur des plaines enneigées de Jotunheimr, au milieu des meutes de loups des neiges, pendant une matinée d'hiver - enfin, je dis ça mais c'est toujours l'hiver là-bas. Mes parents, toutes ma famille fait partie des fameux nomades de Jotunheimr. La cohésion du groupe était très importante pour survivre et nous nous serrions les coudes chaque jour et chaque nuit. Mon père était le chef des nomades : respecté, courageux, incroyable chasseur... Je me sentais archi nul quand je me comparaissais à lui ; et cela arrivait plutôt souvent.
Toute mon enfance s'est déroulée au milieu des tempêtes de neige et des montagnes dont je ne voyais pas le sommet ; à pourchasser des animaux pour nous nourrir et survivre ; à jouer avec les autres enfants de la tribu. Je ne dirais pas qu'elle fut particulièrement douce, mais elle ne fut pas spécialement dure non plus ; du moins au début.
L'un des événements qui m'a le plus marqué fut certainement la mort de ma sœur cadette. Elle avait seulement sept ans, mais je l'avais entraînée à tirer à l'arc et elle se révélait être une archère très douée, enfin, pour son âge. Un jour elle alla s'entraîner vers le lac Loghlin, près de notre campement. Elle n'en rentra jamais. Quand nous vîmes que la nuit tombait et qu'elle n'était toujours pas rentrée, l'inquiétude nous gagna, et plusieurs chasseurs partirent à sa recherche. Du haut de mes onze ans, je n'étais pas autorisé à y aller.
L'attente d'une quelconque nouvelle fut un moment horrible. Et puis très tard la nuit - ou très tôt le matin, c'est comme vous voulez - un chasseur est revenu, le corps glacé de ma sœur dans les bras. La peau de la petite avait viré au bleu le plus cadavérique ; elle était gelée de la tête aux pieds. Elle s'était noyée dans le lac, et ne savait pas nager. Il y avait encore quelques bribes de vie en elle, mais personne n'essaya de la sauver. Nous savions que c'était d'ores et déjà trop tard.
Si l'année de mes onze ans fut la plus affreuse ; celle de mes quatorze ans fut celle marquée du signe du changement.
Je ne sais pas ce qu'il me prit ce jour-là. Mais j'avais fugué. Sans demander mon reste, j'avais fuis pour m'éloigner de Jotunheimr. Après une énième dispute avec mes parents, je pris le strict nécessaire - des vêtements, des armes et de la nourriture -, montais sur un cheval et tentais de sortir de Jotunheimr avant que l'on ne me repère et me rattrape.
Et aussi étonnant que cela puisse paraître, j'ai réussi.
La partie sombre de moi-même prétend qu'ils n'ont simplement pas voulu me rattraper, mais je me persuade à dire que c'est faux.
Quand j'arrivais à Pandora, le royaume qui me paraissait le plus accueillant, Loitaceila était en plein émoi : la sorcière Akashi prenait le pouvoir et imposait sa dictature. Encore une fois, ne me demandez pas ce qu'il m'a prit car je ne le sais pas, mais je me portais volontaire pour entrer à son service. J'avais seize ans, j'étais un peu idiot, et je n'avais même pas réfléchi.
Mais je m'en suis plutôt bien sorti, et quatre ans plus tard j'étais particulièrement bien placé : à la tête d'une escouade de mages noirs puissants. Bon, du coup nombreux sont ceux qui veulent m'éliminer... Mais je me porte bien pour l'instant.